Extrait du livre d’Olivier Delacroix – Luigi – Nos chemins sont semés de rencontres
Oui. ..
Oui, des hommes et des femmes sont solidaires.
Oui, on peut changer les choses par des actions à notre portée.
Oui, même des actions qui semblent vaines ont leur utilité, peuvent porter leurs fruits.
Oui, on peut trouver des mains tendues. Oui, ça vaut la peine d’essayer !
Mais non, je ne suis toujours pas le gentil de service. J’espère que vous l’aurez compris … Je ne suis pas un optimiste béat, je ne prêche pas pour une paroisse.
J’essaie simplement d’être attentif à l’autre, depuis toujours. Peut-être parce que je me suis toujours posé des questions, depuis l’enfance. J’ai depuis ce moment le sentiment que les autres peuvent m’apporter des réponses aux questions qui tournent inlassablement dans ma tête. J’ai cette curiosité de les comprendre, j’en ai parlé.
Je pense aussi que nous sommes nombreux à chercher notre chemin dans ce monde, et que nous avons plus de chances de le trouver à plusieurs.
Enfin, l’expérience m’a montré que l’initiative individuelle peut faire bouger des montagnes et que c’est là, autour de nous, dans notre vie quotidienne, que nous pouvons agir.
Je vous ai déjà parlé de Luigi, ce petit garçon autiste dont les parents se battent pour le faire sortir de son isolement. Malgré des paroles terribles d’un éminent médecin, ils n’ont pas voulu s’avouer vaincus. Au lieu d’accepter un placement dans une institution et le cortège de médicaments qui va avec, ils ont cherché partout une autre solution. Et ils ont trouvé. Grâce à l’expérience des autres, notamment. Une méthode qui vient des États-Unis obtient des résultats spectaculaires sur les enfants autistes. Elle prend le contre-pied des principes suivis jusque-là et s’appuie sur une stimulation constante de l’enfant. C’est la méthode des 3i, pour « individuelle, intensive, interactive» que j’ai précédemment évoquée. Elle suppose une implication très importante des parents, bien sûr, mais aussi une prise en charge de l’enfant toute la journée. Il faut le stimuler, le faire travailler au moins six heures par jour. Le but est de le faire repasser par tous les stades de l’apprentissage, mais par le jeu uniquement.
Pour Luigi, les résultats ont été impressionnants. Alors qu’il ne parlait pas, n’entrait en contact avec personne, il a réussi en quelques mois à prononcer ses premiers mots, puis à parler, et il est maintenant scolarisé deux heures par jour dans une école classique. C’est une grande victoire pour ses parents. Une grande victoire et un engagement de tous les instants.
Ce qui est formidable, dans l’histoire de Luigi, c’est la chaîne de solidarité qui s’est constituée autour de lui. Ses parents ne pouvaient pas assurer seuls la stimulation de leur fils, ils ont donc fait appel à des volontaires. Par le biais de petites annonces dans leur village. C’était un peu une bouteille à la mer, comme me l’a expliqué Sophie, la maman de Luigi. Mais il fallait tenter le coup. Et ça a fonctionné ! Les volontaires se sont présentés, ils ont suivi une petite formation, et ils font maintenant partie de l’emploi du temps de ministre de Luigi.
Cette mobilisation qui a permis à ce petit garçon de sortir du silence, d’entrer en contact avec son entourage, est pour moi hautement symbolique de ce que nous pouvons faire dans notre vie de tous les jours. Chacun donne deux heures par semaine -on peut les trouver-, et un enfant voit sa vie changer.
C’est cette échelle de l’action qui m’a toujours frappé. On voudrait changer le monde et on se dit que c’est impossible, que l’on ne va pas devenir président de la République ou imposer une nouvelle éthique aux banques, mais les vrais changements sont aussi ailleurs. Autour de nous. Dans « notre » monde, là où nous passons nos journées. En aidant un enfant, en donnant des coups de main, en étant suffisamment ouverts aux autres, en fait, pour améliorer ce qui est à notre portée.
C’est cela, savoir dire oui. Et les pistes sont nombreuses …
Rétrolien depuis votre site.