Luigi , 2 ans de sa bulle à l’école à 5 ans
Une vidéo sur plusieurs années de 3i avec Luigi
Il vivait dans son monde à lui. Avec les 3i, il s’est ouvert et a beaucoup apprivoisé son environnement.
Sophie Colonna, son fils, sa batailleÀ l’occasion de la Journée de sensibilisation à l’autisme, vendredi 1er avril, Sophie Colonna et Luigi, son fils de 10 ans, scolarisé en CM1, nous ont raconté leur quotidien, un parcours âpre mais porteur de grands espoirs.
ZOOM Luigi et sa maman Sophie. / Frédéric Pétry pour La Croix
Les mots du psychiatre résonnent encore dans la tête de Sophie Colonna :« Votre fils souffre d’un autisme sévère, le mieux sera de le placer en institution. Pleurez un bon coup et passez à autre chose », avait-il conseillé aux parents anéantis. « Son message c’était : “Vivez, de toute façon votre fils est perdu.” Luigi avait 2 ans et on le condamnait », raconte aujourd’hui cette mère de trois enfants, qui vit dans un coin de campagne, à 30 kilomètres de Paris. Ni elle ni son mari n’ont pu s’y résoudre.
Huit ans après, en cette fin de matinée pluvieuse, Luigi rentre de l’école. Avec son visage très doux, son sweat à capuche et son cartable, il ressemble à n’importe quel élève de CM1. Certes il quitte l’établissement avant les autres, car y passer une journée entière serait trop difficile, en raison de l’agitation, du bruit et de la nécessité de rester assis. Le garçon de 10 ans suit donc certains enseignements à la maison, avec l’aide des répétiteurs du Centre national d’enseignement à distance (Cned).
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« On revient de loin »
Pour Sophie, ce parcours scolaire est une victoire, parmi beaucoup d’autres : l’accès à la parole, à 5 ans, la fin des gestes stéréotypés de Luigi, la diminution de ses angoisses, qui pouvaient être terribles. « Quand il était bébé, je ne pouvais pas le mettre nu pour le bain, se souvient cette belle femme de 46 ans, au regard un peu triste. C’était comme si je le plongeais dans du feu… On revient de loin », souffle-t-elle. « Si nous l’avions mis en institution, notre fils en serait encore à se taper la tête contre les murs », est persuadé son père, Ferdinand.
Ses parents ont choisi d’aller « contre l’ordre établi », disent-ils. « On nous proposait une voie de garage, alors on a suivi nos tripes et il en fallait, car la pression était énorme, du corps médical, de notre entourage… », souligne Sophie Colonna.
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Grâce à d’autres médecins, la maman entend parler de l’association Autisme espoir vers l’écoleCe choix exige une grande organisation : « Il fallait trouver 40 bénévoles, pour jouer avec Luigi six heures par jour, toute la semaine, poursuit-elle.Chaque “séance”, dans la salle de jeux, durait une heure et demie, autour d’une balançoire, d’un petit trampoline, d’un miroir et de jouets trouvés dans des brocantes. » Formés par l’association, les bénévoles avaient surtout pour rôle« de solliciter l’enfant mais sans le contraindre. Il s’agissait avant tout d’être avec lui, de favoriser l’échange », décrit Sophie, qui pour la première fois reprend espoir.La directrice de l’école, des voisins, des amis acceptent d’aider Luigi. « Au bout d’une heure de jeux, on en retrouvait certains hilares, à jouer par terre, les cheveux ébouriffés ! », s’amuse Sophie. Quant à Luigi, il commence à sortir de sa bulle. « Il s’est mis à nous regarder, à sourire. Un jour, en rentrant à la maison, il a dit : “Je suis là !” C’était majeur : cela voulait dire qu’il se sentait exister. » « 24 heures sur 24, le jour, la nuit »
Cette prise en charge a duré quatre ans, jusqu’à l’entrée à l’école à 6 ans. Quatre ans sans répit pour Sophie, qui dit « avoir puisé jusqu’à la moindre petite parcelle d’énergie » trouvée en elle. S’occuper des bénévoles, bien sûr, mais aussi se battre pour que Luigi soit scolarisé, répondre aux exigences du Cned, tout en s’occupant de ses deux autres enfants, de la maison… « Ce qui est difficile avec cette maladie, c’est que c’est 24 heures sur 24, le jour, la nuit – pendant trois ans, je n’ai quasiment pas dormi… On risque parfois de se perdre soi-même. » « En un an, je l’ai vu progresser, devenir plus autonome, constate l’institutrice. La grande force de sa mère, c’est de chercher sans cesse, de n’être jamais figée. Sophie voit d’abord son enfant, pas le handicap, et elle ose. »Depuis quelques mois, le garçon est inscrit à un cours de tir, comme son frère. Lors de la dernière compétition, il a gagné une médaille de bronze.
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